La Suisse et la Gambie ont co-présidé, les 20 et 21 septembre à Genève, les travaux d’une réunion thématique du Processus de Rabat sur la séparation des familles et les personnes disparues, dans le contexte de la migration. A l’issue de la rencontre, M. Vincenzo Mascioli, Directeur des Affaires internationales du SEM (Secrétariat d’État aux migrations) a accordé une interview à reflets suisse-afrique sur le Processus de Rabat. Entretien.
Qu’est- ce que c’est le Processus de Rabat sur la migration ?
Il s’agit d’un dialogue régional, qui réunit les pays d’Afrique de l’Ouest, du Nord et les pays européens pour aborder ensemble la migration sous ses différents angles : développement, mobilité, prévention de la migration irrégulière, protection des migrants, retour et réintégration. Ce n’est pas un organe qui prend des décisions, mais c’est une importante plateforme de dialogue et d’échanges. En se voyant régulièrement, on apprend à se connaître et on finit par se comprendre.
Cette présentation montre un cadre de dialogue et de concertation fort utile sur la migration, mais peu connu du grand public. Quel rôle joue la Suisse dans ce cadre ?
La Suisse a progressivement pris des responsabilités dans le Processus de Rabat. Nous nous sommes engagés pour la protection des migrants sur les routes migratoires, en particulier concernant les mineurs non accompagnés. Plusieurs évènements ont été organisés depuis 2021, comme la réunion récente sur le thème de la séparation des familles et des migrants disparus, qui s’est tenue à Genève, en septembre et que nous avons co-présidée avec la Gambie.
Que dire et retenir de cet engagement suisse, qui est un pays d’accueil et de transit des migrants ?
Notre pays a une politique d’asile qui repose sur le droit international et sur une réglementation nationale très aboutie. Elle a pour objectif de maintenir le meilleur équilibre possible entre l’accueil des personnes qui ont besoin de protection et la lutte contre la migration irrégulière. En tant que pays au centre de l’Europe, la Suisse se montre aussi solidaire, en s’engageant dans le Processus de Rabat et avec des projets concrets sur place pour soutenir les pays qui se trouvent sur les routes migratoires.
Vous avez parlé tout à l’heure d’une récente rencontre à Genève, précisément les 20 et 21 septembre. Elle était consacrée aux personnes disparues sur les routes migratoires. Quelles en sont les conclusions ?
Les pays membres du Processus de Rabat prennent le sujet au sérieux et veulent rester impliqués. Ils cherchent des moyens concrets pour renforcer la coopération transnationale, par exemple en désignant des représentants nationaux, et en établissant des canaux de communication réguliers. La Gambie souhaite accueillir la prochaine réunion thématique sur le sujet et offrir ainsi une plateforme pour développer les approches discutées pour la première fois à Genève.
Comment la Suisse en est-elle arrivée à organiser une rencontre internationale sur ce sujet ?
La question des personnes disparues dans le contexte des conflits ou de la migration est une question humanitaire essentielle. Le CICR (Ndlr : Comité International de la Croix-Rouge), avec son agence centrale de recherche à Genève, travaille sur ces questions depuis sa création. Les défis de coordination entre États restent importants, et nous nous sommes engagés, avec nos collègues des Affaires étrangères, pour introduire cette thématique dans le cadre du Processus de Rabat.
Par cette conférence, la Suisse voudrait-elle adresser un message, exprimer une préoccupation, ou alerter sur les cas de disparition de migrants sur les routes ?
On le voit dans les médias : les drames sont quotidiens. Il est nécessaire d’agir sans tarder et la coordination entre États est primordiale. Prévenir les disparitions et identifier les personnes décédées est une tâche commune à tous les États situés le long des routes migratoires. Cette tâche ne peut toutefois être maîtrisée qu’en étroite collaboration avec des acteurs non étatiques, tels que le CICR, les Sociétés nationales de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge, mais aussi les survivants.
Les disparitions sur les routes migratoires sont les conséquences de l’une migration irrégulière. Que préconise la Suisse pour lutter plus efficacement contre ce phénomène ?
La coordination entre États est indispensable pour lutter contre la migration irrégulière et réduire les risques sur les routes migratoires. La Suisse s’engage aussi beaucoup dans le cadre de ses dialogues et de ses partenariats migratoires bilatéraux avec plusieurs pays en Afrique de l’Ouest et du Nord, afin de contribuer à une meilleure gouvernance de la migration. Offrir des perspectives socioprofessionnelles sur place pour les jeunes est également essentiel pour prévenir la migration irrégulière et constitue un axe de coopération prioritaire pour la Suisse.
Propos recueillis par Ibc