L’Initiative suisse pour des multinationales responsables, sur laquelle le Peuple souverain se prononcera le 29 novembre, déborde en Afrique. Elle provoque des remous dans le lointain Burkina Faso, en Afrique de l’ouest.
La semaine dernière, le ministre du Commerce et de l’artisanat du pays, M. Harouna Kaboré, était à Berne pour apporter son « soutien » aux opposants de l’initiative. « Un parti pris et une ingérence regrettable » dans un débat démocratique interne à la Suisse, se sont indignées des organisations de la société civile locale.
Dans une déclaration conjointe publiée sur le site : lefaso.net, le Centre d’études et de recherches sur le droit de l’environnement (CERDE) et l’African coalition for corporate accountability (ACCA) ont fait la leçon au ministre. « La France qui est, à n’en point douter, l’un des premiers partenaires commerciaux du Burkina Faso a adopté en 2017, une loi similaire à l’initiative suisse sans que cela n’ait suscité un tel courroux des autorités burkinabè, bien plus proches de Paris que de Berne », ont-elles rappelé. Elles rejetaient la justification donnée par le ministre Kaboré sur le bien-fondé de son soutien aux opposants.
Pour les deux organisations, la position du ministre burkinabè est en porte-à-faux avec « l’évolution normative internationale » sur le sujet. Elle contredit ouvertement aussi l’effort et les engagements internationaux du Burkina Faso sur la nécessité d’une redevabilité des entreprises multinationales, en cas de non-respect des règles internationales de protection des droits humains et de l’environnement.
OBLIGATION DE PROTEGER
En 2011, le Conseil des droits de l’homme avait adopté à l’unanimité, les principes directeurs des Nations- Unies sur les entreprises et les droits humains. Ces principes, internationalement reconnus comme cadre de référence prévoient une obligation de « diligence raisonnable », à charge des entreprises multinationales dans leur opérations. C’est ce type d’obligation juridique que l’initiative suisse vise à établir dans le droit interne suisse.
« Mieux, ont poursuivi les deux organisations, le Burkina Faso fait partie des 14 Etats à avoir voté, le 29 juin 2014, en faveur de la résolution 26/9 du Conseil de droit de l’homme des Nations- Unies ». Celui-ci appelle prône l’élaboration d’un instrument international juridiquement contraignant sur les sociétés transnationales et autres entreprises en matière de droits humains. Ce cadre juridique a même une vocation plus ambitieuse et plus contraignante. En tant que membre du groupe africain et à titre individuel, le Burkina Faso est resté engagé dans ce processus, toujours en cours au sein des Nations- Unies.
Il apparait donc clairement que le Burkina Faso milite au plan international et régional, en faveur d’obligations internationales plus contraignantes pour les entreprises multinationales en matière environnementale et des droits humains. Cet engagement a été constamment sollicité et salué par la société civile burkinabè et africaine. On peine dès lors à comprendre comment le Burkina pourrait subitement voir d’un mauvais œil l’adoption de lois nationales comme celle initiée en Suisse.
Enfin, pour le CERDE et ACCA, en vertu de ses engagements internationaux en matière de droits humains, l’Etat du Burkina Faso à l’obligation de protéger ses citoyens contre toutes formes de violations de leurs droits. (…).
NR