Entre la Suisse et Madagascar, les relations sont au « beau fixe », déclare le Représentant local de Berne. Dans une interview à reflets Suisse-Afrique, l’Ambassadeur Philippe Brandt parle de la contribution suisse à la récente élection présidentielle, ainsi que des relations entre la Suisse et ses trois pays d’accréditation : Madagascar, Seychelles et Comores.
La récente présidentielle à Madagascar a été l’une, si non, la plus ouverte du pays depuis son indépendance. Quelle a été la contribution suisse à ce scrutin ?
En effet, avec 36 candidats en lice et l’ouverture de plus de 24’000 bureaux de vote à travers tout le pays, nous pouvons dire que cette élection présidentielle était très ouverte.
L’aboutissement de l’élection présidentielle 2018 reflète le travail sans relâche des différentes institutions malgaches appuyée par une communauté internationale très soudée. La Suisse pour sa part a activement participé au travail du Comité de pilotage du SACEM (Soutien Au Cycle Electoral de Madagascar) placé sous les auspices de la CENI (Ndlr : Commission électorale nationale indépendante) et du PNUD (Programme des Nations-Unies pour le développement).
En outre, l’Ambassade de Suisse à Madagascar a aussi participé aux missions d’observations de l’Union Européenne et des Etats-Unis lors des scrutins du premier et deuxième tour.
Au vu de l’importance de cette contribution, quelles sont les attentes de la Suisse ?
La Suisse à travers sa contribution au projet SACEM souhaitait que le processus électoral soit mené à terme dans le respect des institutions républicaines et du cadre constitutionnel. Maintenant que les élections présidentielles sont terminées, Madagascar peut continuer son chemin sur la voie du développement durable.
Au-delà de cette élection présidentielle à Madagascar, comment la Suisse contribue-telle à la promotion de la démocratie, des droits de l’homme, ainsi qu’à la lutte contre la migration et contre la pauvreté dans l’ensemble des pays que vous couvrez ?
Depuis l’indépendance de Madagascar en 1960, la Suisse a mis en place plusieurs programmes de coopération au développement, entre autres dans le domaine rural et la gouvernance. La coopération suisse n’est plus présente à Madagascar depuis la fin 2016. Par contre, elle s’engage au plan humanitaire et en 2018, a soutenu Madagascar à hauteur de 1,3 millions de francs suisses (Ndlr : 757 millions de francs CFA).
Quant aux Comores et aux Seychelles, les projets de coopération classiques se limitent au programme des « Petites Actions » de l’Ambassade de Suisse à Madagascar. Chaque année, l’Ambassade dispose d’un crédit qui permet le financement d’un nombre limité de micro-projets dans le domaine de la sécurité humaine, de la promotion des droits humains et du développement durable à Madagascar, aux Comores et aux Seychelles
Comment se présente la présence suisse à Madagascar et dans les deux autres pays, à savoir les Comores et les Seychelles ?
La présence suisse à Madagascar et aux Seychelles est relativement importante ; aux Comores, elle l’est moins. Nous comptons 630 Suisses immatriculés auprès de notre consulat dans les trois îles, dont de nombreux double nationaux. La communauté suisse contribue activement au développement de ses pays d’accueil et à la vie locale. Enfin, une cinquantaine d’ONG (Organisations non gouvernementales) suisses sont actives dans la région, essentiellement dans la Grande Île. Avec les Seychelles, la Suisse entretient des relations riches, en particulier au sein des institutions multilatérales (environnement et changement climatique, soutien de candidatures, etc.). La collaboration concerne également quelques niches spécifiques telles que le tourisme et le transport aérien (voir ci-dessous), la santé publique (avec l’appui du Centre Hospitalier Universitaire Vaudois CHUV), les affaires fiscales (échanges de renseignements fiscaux), les sciences (avec l’Ecole polytechnique fédérale de Zürich).
Quels sont les domaines où cette présence suisse est la plus marquée ?
Quelques grandes ONG suisses se distinguent sur le terrain – HELVETAS, ADES (Association pour le développement de l’énergie solaire), et Action de Carême, notamment opérationnelles dans le domaine de la gouvernance -, mais l’action de la société civile suisse est globalement remarquable. A noter également la présence de sœurs suisses de divers ordres dont le dévouement à la cause des plus vulnérables est remarquable.
Sur le plan économique et commercial, que peut-on dire des relations entre la Suisse et vos pays d’accréditation ?
Quelques grandes entreprises suisses sont représentées à Madagascar – dont LafargeHolcim, Givaudan et la SGS (Ndlr : Société générale de surveillance) – outre de très nombreuses PME dirigées par des ressortissants suisses et actives dans de nombreux domaines (industrie du bois, hôtellerie et restauration, épices, minoteries, huile de palme certifiée bio, agriculture etc.). Depuis 2015, un APPI (Accord de promotion et de protection des investissements) est en vigueur entre les deux pays. Le volume des échanges reste relativement modeste (environ 63 millions de francs suisses en 2017 Ndlr : 36,6 milliards de francs CFA).
Aux Seychelles, c’est le tourisme qui représente la marque de fabrique suisse, avec des arrivées record en 2018 (13’394 arrivées, pour être plus précis), ce qui place la Suisse parmi le peloton de têtes des visiteurs, grâce à l’introduction d’un vol direct de la compagnie aérienne Edelweiss Air entre Zürich et Mahé en septembre dernier. Pour les Comores, les relations économiques et commerciales se traduisent par un très faible volume d’environ un demi-million de francs suisses -(296,16 millions de francs CFA)- (essentiellement, importation de vanille et d’ylang-ylang).
Quelles perspectives dans les relations entre la Suisse et ces pays ?
Les relations entre la Suisse et les trois pays d’accréditation sont au beau fixe et rien ne s’oppose à ce qu’elles s’améliorent encore à l’avenir, au plan qualitatif en particulier. La présence d’une représentation malgache, comorienne et seychelloise à Genève constitue un atout dans ce sens – renforcé dans la mesure où les représentants permanents auprès des Nations Unies sont ou seront prochainement également accrédités auprès de la Confédération suisse. Durant mon mandat, j’ai mis l’accent sur le développement de relations sereines et épanouies, fondées sur des actions mutuellement bénéfiques, et je pense y être parvenu. Bien entendu, l’accueil chaleureux et professionnel qui m’a été réservé dans les trois capitales y a fortement contribué, ainsi que la bonne réputation de la Suisse dans la région en tant que partenaire fiable.
Propos recueillis par IC