Droit pénal international : Un ancien ministre de l’Intérieur de Gambie poursuivi en Suisse

M. Ousman Sonko, ex-ministre de l'Intérieur de Gambie de 200 à 2016 poursuivi en Suisse.

Le Ministère public de la Confédération (MPC) a déposé, mardi 17 avril 2023, auprès du Tribunal pénal fédéral (TPF), un acte d’accusation contre M. Ousman Sonko, ex-ministre de l’Intérieur de Gambie, en Afrique de l’ouest, de 2006 à 2016.

Il lui est reproché, dans le cadre de ses fonctions, d’avoir soutenu, participé, et de ne pas s’être opposé aux « attaques systématiques et généralisées », des forces de sécurité contre tout opposant au régime du Président Yahya Jammeh. Les reproches s’étendent sur une période de 2000 à 2016 et seraient notamment constitutifs de crimes contre l’humanité, au sens de l’art. 264a du Code pénal suisse (CP).

L’acte d’accusation a été déposé après une enquête pénale de plus de six ans, au cours desquels de nombreuses personnes ont été entendues. Il s’agit d’une quarantaine de plaignantes, de personnes pouvant donner des renseignements, et des témoins. En outre, six déplacements de la direction de la procédure ont eu lieu en Gambie, dans le cadre d’une entraide judiciaire obtenue des autorités du pays.

Dans son acte d’accusation, le MPC a rappelé qu’en juillet 1994, un Lieutenant de l’armée gambienne, M. Yahya Jammeh, a renversé M. Dawda Jawara, premier Président du pays, depuis son indépendance en 1970, à la faveur d’un coup d’Etat. Après une période transitoire, M. Jammeh a été élu président en septembre 1996. Commencent alors vingt années d’un pouvoir autoritaire, marquées par « une répression » contre toute opposition.

TORTURE ET VIOL

Le MPC reproche à M. Ousman Sonko d’avoir soutenu et participé à cette « politique répressive » mise en place par le président Jammeh. Elle visait, en particulier, des opposants politiques, des journalistes, et des putschistes présumés. Elle aurait été caractérisée notamment par le recours systématique à « la torture, au viol, aux exécutions extrajudiciaires, aux détentions arbitraires ou aux disparitions forcées ». Elle aurait été le fait d’actions systématique entre des acteurs, susceptibles d’être dépendants, d’une part directement de la Présidence (l’Agence nationale de renseignements NIA], la Garde nationale du Président et l’unité paramilitaire spéciale « Junglers » notamment),  et d’autre part, des services de police et des autorités pénitentiaires, placées sous la responsabilité du ministère de l’Intérieur.

Né en 1969, M. Sonko a rejoint l’armée gambienne en 1988. Il a été nommé commandant de la Garde nationale en 2003. A ce titre, il était responsable de la sécurité du Président Jammeh. En 2005, il a été promu à la fonction d’Inspecteur général de la police, avant d’être nommé au portefeuille de ministère de l’Intérieur, en 2006. En septembre 2016, quelques mois avant la fin du régime de Jammeh, il a été démis de ses fonctions, puis a quitté le pays pour l’Europe, afin d’y demander l’asile. Sa présence en Suisse a été signalée à la fin novembre 2016.

GT