Plus d‘un mois après le Sommet de l’Organisation internationale de l’ Francophonie à Djerba, en Tunisie, l’Ambassadrice Muriel Berset Kohen, Déléguée Permanente de la Confédération auprès de l’UNESCO et de l’Organisation internationale de la Francophonie, dresse un bilan de la participation de son pays aux assises.
Le XVIIIe Sommet des chefs d’Etat et de gouvernement des pays membres de l’Organisation internationale de la Francophonie (OIF) a eu lieu Djerba, en Tunisie, les 19 et 20 novembre derniers. Quel bilan pour la Suisse ?
Le bilan est très positif pour la Suisse. Le Président Ignazio Cassis a participé au Sommet dont il a été nommé vice-Président. La thématique du Sommet « Le numérique, vecteur de développement et de solidarité dans l’espace francophone » est importante pour nous tous et pour la Suisse aussi. La Suisse s’est particulièrement investie dans la table-ronde consacrée à cette thématique et le Président Cassis a modéré, avec le Président du Sénégal Macky Sall, la table-ronde sur ce sujet et en a été ensuite le rapporteur en plénière. Il a fait des propositions concrètes pour le suivi. Au village de la Francophonie, la Suisse avait aussi un pavillon dans lequel elle a mis en valeur la Genève internationale et ses organisations actives dans ce domaine : Le GESDA , I-DAIR , GIGA , et la DiploFOundation , qui vient de faire un rapport intitulé « Des voix plus fortes de l’Afrique : Bâtir une politique étrangère et une diplomatie numériques africaines. ». Le Sommet a permis aussi de réélire la Secrétaire générale de l’OIF Louise Mushikiwabo et la Suisse s’en réjouit. La Suisse soutient fortement les réformes de l’Organisation entreprises par la Secrétaire Générale.
De manière générale quelle est l’image de la Suisse au sein de l’Organisation internationale de la Francophonie ?
Il faudrait plutôt poser la question aux autres membres ! Mais la Suisse y jouit d’une bonne image je pense. Elle est le troisième bailleur de fonds de l’Organisation. Elle est constructive et chérit le consensus et la solidarité qui caractérisent les relations au sein de l’Organisation. Elle est attachée à mieux définir le profil de l’Organisation, la rendre plus efficace, et donc à en améliorer la gouvernance. Nous partageons ces objectifs avec la Secrétaire générale et un bon nombre d’Etats membres.
Quelles sont ses priorités et comment les défend-t-elle ?
Les Affaires étrangères suisses ont rédigé cette année une Feuille de route de la Suisse en Francophonie dans laquelle sont définis quatre axes thématiques prioritaires pour la période 2022 – 2025. Ce sont : la Démocratie, la paix et les droits de l’homme ; la Langue française et le plurilinguisme ; la Genève internationale, la gouvernance numérique et la numérisation et enfin la Prospérité. Traditionnellement les deux premiers axes étaient les fondements de l’engagement de la Suisse en Francophonie. La Suisse soutient fortement la dimension politique de la Francophonie et les valeurs partagées de promotion de la Démocratie et des droits de l’Homme. L’Axe numérique s’est rajouté plus récemment, avec l’adoption par la Francophonie d’une Stratégie numérique qui coïncide d’ailleurs largement avec la Stratégie numérique de la Suisse ce qui va permettre maintenant plus facilement de décliner notre coopération en actions concrètes. Enfin la Prospérité, qui fait référence à la dimension économique et de solidarité de la Francophonie à laquelle la Suisse participe aussi.
Parmi les conclusions du Sommet, il y a la mise en place d’un « Cadre stratégique 2023-2030 », avec de nouveaux objectifs stratégiques pour une coopération multilatérale francophone toujours plus pertinente. Comment la Suisse envisage-t-elle de contribuer à ce cadre stratégique ?
Le cadre stratégique 2023-2030 est très lisible et décline clairement à travers 5 « ambitions » principales et 18 « objectifs stratégiques », la direction que la Francophonie souhaite prendre pour l’avenir. La Feuille de route de la Suisse en Francophonie coïncide en grande partie avec ces ambitions et s’inscrit donc pleinement dans ce Cadre stratégique. Il va sans dire que la Suisse se tient aux côtés de la Secrétaire Générale dans la pleine mise en œuvre du Cadre stratégique 2023-2030.
Il y a aussi une « Résolution sur les situations de crise, de sortie de crise et de consolidation de la paix dans l’espace francophone ». Que vous inspire-t-elle ?
En effet les chefs d’Etat et de gouvernement adoptent deux documents durant les Sommets : la Déclaration du Sommet et la Résolution que vous mentionnez. Il faut savoir que la Déclaration n’aborde pas la situation dans les pays de l’Espace francophone, et c’est donc la Résolution qui le fait. A Djerba, les chefs d’Etat et de gouvernement ont adopté une Résolution qui aborde la situation dans 13 pays de l’Espace francophone, ainsi que le Sahel. Les négociations sur ce texte ont été parfois assez tendues et enflammées, mais cela fait partie de la dynamique habituelle des négociations multilatérales. Cette résolution est la traduction au moment des Sommets du mandat politique de l’OIF, tel qu’exprimé en particulier dans la Déclaration de Bamako de 2000 sur la démocratie, les droits et les libertés dans l’espace francophone et la Déclaration de Saint Boniface de 2006 sur la Prévention des conflits et la Sécurité humaine. C’est très positif et important que les chefs d’Etat et de gouvernement puissent décider par consensus sur ces situations. Consensus et solidarité sont liés en Francophonie et sont en quelque sorte notre « marque de fabrique » comparé à d’autres organisations multilatérales.
Quelles sont les perspectives suisses pour la Francophonie ?
S’engager encore plus et mieux dans notre famille francophone !
Propos recueillis par IC